Le pouvoir de l'amour qui change des vies

On dit que l'amour guérit tout, mais il existe une phrase encore plus vraie et plus transcendante: l'amour change tout. L'amour est la force de transformation la plus puissante qui existe. Il n'est pas surprenant que Martin Luther King, champion de la lutte contre la discrimination raciale aux États-Unis, a intitulé son œuvre la plus connue “Le pouvoir d'aimer”.

L'amour qui change des vies n'est pas n'importe quel amour. La Bible illustre l'essence de cet amour par des histoires vraies à la fois émouvantes et édifiantes. L'une des plus remarquables est celle de Ruth et Naomi. Goethe a qualifié cette histoire de “plus belle nouvelle de la littérature mondiale”. L'amour de Ruth a changé la vie de Naomi et l'amour de Boaz, à son tour, a changé la vie des deux.

L'histoire de Ruth et Naomi nous montre les deux piliers sur lesquels repose l'amour qui transforme des vies: la foi en Dieu et la fidélité. L'amour naît de la foi et se nourrit de la fidélité. Les trois sont en interaction permanente, se nourrissant l'un l'autre dans le cadre d'une rétroaction divine. Le livre de l'Ecclésiaste parle de ce “trépied” comme d'une corde à trois fils (Ec. 4:12 LSG). La foi en Dieu conduit à un amour fidèle, un amour qui ne se fissure pas facilement et qui ne périt jamais (1 Co. 13:8 LSG).

Le livre de Ruth évolue sur deux plans, deux histoires se chevauchent: l'histoire d'une famille et l'histoire du salut des êtres humains. Une lecture simultanée des deux plans est essentielle. Le livre de Ruth n'est pas seulement une délicieuse histoire d'amour, c'est aussi un reflet et un avant-goût de la plus grande histoire d'amour qui soit: l'amour de Dieu pour ce monde, vous et moi.

Le texte (Ruth 3) illustre lumineusement ce double plan: Boaz -le rédempteur qui sauve Ruth et Naomi- préfigure le Rédempteur par excellence, Christ. Le texte contient une forte densité d'amour, c'est un modèle d'amour en action. Tout ce qui se passe cette nuit-là sur l'aire de battage est émouvant et raconté avec une beauté sobre, comme c’est le propre de la Parole de Dieu.

Nous observons trois attitudes d'amour qui précèdent les actes -les œuvres- d'amour.

• Chez Naomi, l'initiative de l'amour
• Chez Ruth, la loyauté de l'amour
• Chez Boaz, la générosité de l'amour

1. L'amour prend l'initiative: Naomi (Ruth 3:1-5)

L'amour fait le premier pas, il est proactif. Notons la fermeté avec laquelle Naomi s'adresse à Ruth: Ma fille, je voudrais assurer ton repos, afin que tu fusses heureuse? (Rt. 3:1 LSG).

L'amour commence par un regard, le regard qui pénètre l'âme de l'autre personne et demande: de quoi as-tu besoin ? Je veux te voir heureux. C'est le regard profond et empathique de Jésus dans les yeux du jeune homme riche quand le regardant, il l'aima (Mc. 10:21 LSG). Oui, l'amour, au fond, est une question de regard. Il exige de cesser de regarder à l'intérieur de soi et de regarder le “toi” d'à côté, le voisin. Et pour cela, il faut regarder vers le Ciel pour voir l'Invisible (He. 11:27 LSG) et fixer les yeux sur Jésus (He. 12:2 LSG).

Non seulement Naomi a un fort désir d'aider, mais elle s'avance, elle fait le premier pas. À cette fin, elle élabore un plan minutieux, une stratégie sage pour que tout aille bien pour toi. Une belle expression. “Je veux que tu réussisses et je ferai tout ce que je peux pour que tu réussisses”. Elle se met donc au travail pour que Ruth puisse se marier et trouver sa place dans la vie. Le plan de Noémi est une admirable combinaison de courage et de prudence, de sagesse et de sensibilité.

Cet amour qui prend l'initiative est l'amour dont Jésus nous parle dans ce que l'on appelle la Règle d'or: Out ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le de même pour eux (Mt. 7:12 LSG). Notre tendance naturelle est tout le contraire, comme l'exprime le dicton populaire: “Ne veux pas pour les autres ce que tu ne veux pas pour toi-même”.

C'est un amour incompatible avec l'individualisme. L'individualisme tue l'amour parce que l'amour ne cherche pas son propre intérêt (1 Co. 13:5 LSG). C'est l'une des raisons pour lesquelles il y a tant de relations brisées dans notre société aujourd'hui: il manque cet amour agapè qui se nourrit de la foi et s'exprime dans la fidélité, le “trépied divin”.

L'initiative d'amour de Naomi nous rappelle l'amour de Dieu qui nous a aimés le premier (1 Jn. 4:19 LSG). Et nous sommes appelés à faire de même.

2. L'amour est loyal: Ruth (Ruth 3:6-9)

Ruth incarne la deuxième caractéristique de l'amour: la loyauté ou la fidélité. La loyauté est le ciment qui lie nos relations, en particulier les plus intimes (mariage, famille, amis). Le mépris de la fidélité est l'une des plus grandes tragédies de notre société et a conduit à une épidémie de relations brisées et de solitude.

Ruth avait promis fidélité à Naomi dans l'une des déclarations d'amour les plus mémorables de l'histoire:

Ne me presse pas de te laisser, de retourner loin de toi! Où tu iras j'irai, où tu demeureras je demeurerai; ton peuple sera mon peuple, et ton Dieu sera mon Dieu; où tu mourras je mourrai, et j'y serai enterrée. Que l'Éternel me traite dans toute sa rigueur, si autre chose que la mort vient à me séparer de toi! (Rt. 1:16-17 LSG)

Elle va maintenant confirmer ses paroles par des actes concrets. La loyauté de Ruth présente deux caractéristiques importantes:

La loyauté, c'est l'écoute. Ruth écoute sa belle-mère et suit ses conseils: Elle lui répondit: Je ferai tout ce que tu as dit. Elle descendit à l'aire, et fit tout ce qu'avait ordonné sa belle-mère (Rt. 3:5-6 LSG). L'obéissance de Ruth vient du cœur et non de la contrainte. C'est l'obéissance à laquelle l'apôtre fait allusion dans notre expérience de foi avec le Seigneur Jésus: Mais grâces soient rendues à Dieu de ce que... vous avez obéi de cœur à la règle de doctrine dans laquelle vous avez été instruits (Rm. 6:17 LSG).

La fidélité est courageuse. Le plan de Noémi comportait des risques; la réputation de Ruth en tant que femme était en jeu. Boaz lui dit: Maintenant, ma fille, ne crains point; je ferai pour toi tout ce que tu diras; car toute la porte de mon peuple sait que tu es une femme vertueuse (Rt. 3:11 LSG).

La fidélité de Ruth n'est qu'un petit reflet de la grande fidélité de Dieu, le Dieu de l'alliance chez lequel il n'y a ni changement ni ombre de variation (Jc. 1:17 LSG). C'est la même fidélité que Jésus a eue avec ses apôtres et avec nous: ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, mit le comble à son amour pour eux (Jn. 13:1 LSG).

3. L'amour est généreux: Boaz (Ruth 3:6-18)

La troisième preuve d'amour, la générosité, est incarnée par Boaz. Avec une fermeté digne de Naomi, Boaz dit à Ruth:

Passe ici la nuit. Et demain, s'il veut user envers toi du droit de rachat, à la bonne heure, qu'il le fasse; mais s'il ne lui plaît pas d'en user envers toi, j'en userai, moi, l'Éternel est vivant! Reste couchée jusqu'au matin (Rt. 3:13 LSG).

Observons comment la générosité de Boaz est associée à l'intégrité: Il est bien vrai que j'ai droit de rachat, mais il en existe un autre plus proche que moi (Rt. 3:12 LSG). Boaz veut suivre scrupuleusement la loi et faire les choses avec droiture. La vraie spiritualité est inséparable de l'éthique.

C'est d'ailleurs une générosité qui s'étend jusqu'au matériel. Comme nous l'avons vu plus haut avec la loyauté, elle ne reste pas lettre morte. Elle dit: Il m'a donné ces six mesures d'orge, en disant: Tu ne retourneras pas à vide vers ta belle-mère (Rt. 3:17 LSG).

La générosité est l'une des plus belles preuves d'amour: elle donne et donne en abondance. Quel contraste avec l'égoïste qui ne fait que demander et exiger -également en abondance!- et qui n'a jamais assez. La personne aimante donne inlassablement, l'égoïste demande insatiablement.

À ce stade, quelqu'un peut se sentir frustré: «C'est si difficile d'aimer comme ça! C'est vrai, c'est très difficile, mais ne vous sentez pas frustrés parce que nous parlons d'un amour qui vient de Dieu, il n'est pas naturel mais surnaturel, c'est le fruit de l'Esprit qui nous rend capables par sa grâce. Dieu nous a donné en Christ un grand Sauveur et en l'Esprit Saint un grand entraîneur.

Trois phrases de Boaz ressortent comme des perles dans le texte:

• Ne crains pas, je te ferai... (Rt. 3:11 LSG)
• Repose-toi... je te rachèterai (Rt. 3:13 LSG)
• Ne pars pas les mains vides... Je pourvoirai... (Rt. 3:17 LSG)

Dans ces mots, nous entrevoyons le cœur de l'Évangile: Boaz préfigure le grand rédempteur, le Christ. Tout comme Boaz a changé la vie de Naomi et de Ruth, Christ change radicalement et profondément notre vie. L'amour de Dieu dans Christ est le grand transformateur des personnes et des situations, transformant nos tragédies en histoires pleines de sens. Le point central du christianisme est l'amour de Dieu qui sauve et transforme les vies.

Nous ne pouvons conclure sans reconnaître la providence de Dieu. Dieu sait, Dieu contrôle, Dieu se soucie. Tout le livre de Ruth est imprégné d'un fort sentiment de direction divine. Tout au long du livre, nous voyons comment “en Dieu, la prévoyance est une provision” (José M. Martínez). Dieu fournit la bonne chose au bon moment. Dieu a fourni un Boaz à Ruth et a fourni son Fils pour nous lorsque les temps seraient accomplis (Ep. 1:10 LSG). Belle expression que l'on pourrait traduire par “quand l'heure a sonné à l'horloge de Dieu”.

C'est Dieu qui sonne les heures sur l'horloge de notre vie. Et son horloge marque l'heure parfaite le temps parfait, le kairos qui est le temps juste. Dieu merci, notre vie, comme celle de Naomi et Ruth, n'est pas entre les mains d'un destin aveugle ou d'une quelconque circonstance humaine, mais entre les mains du Dieu tout-puissant et tout-aimant.

Dr. Pablo Martínez